CHAPITRE VII
I
Fusion des Maisons de la
Hunaudaye-Vaucler et de Rieux
Le Château du Vaucler
Ce fut par leurs alliances avec les seigneurs du Vaucler que les comtes de Rieux héritèrent de la Hunaudaye.
« Les branches aînées des Tournemine s'étant éteintes, Jeanne de la Motte-Vaucler, dame de la Hunaudaye du chef de Catherine de Tournemine, sa mère, porta cette terre dans la maison de Rosmadec ». Nous avons déjà vu (Chap. III) qu’à son tour, Catherine de Rosmadec, fille de Catherine de Tournemine, la transmit à celle de Rieux.
Parlons d'abord du château du Vaucler ; viendra ensuite l'histoire de ses châtelains, dignes à tous égards comme à toute époque, de la place d’honneur que nous leur réserverons.
Plus heureux que le Guémadeuc dont il ne reste plus une muraille, le Vaucler a été cependant mutilé à diverses reprises. Il ne lui reste plus qu’une tour, et sa charpente a été en partie abaissée ; mais si amoindri qu’il soit, ses douves et ses étangs comblés, il ne présente pas moins de respectables vestiges de sa vieille origine. Les fenêtres de sa façade, prés du toit, aux armoiries de leurs anciens propriétaires, et son pignon avec pierres sculptées en bordure lui ont conservé son caractère seigneurial.
Nous avons déjà donné les armoiries des Tournemine de la Hunaudaye. Les sires du Vaucler (de Rieux d’Asserac) portaient ; « d'azur à dix besans d’or, 4, 3, 2, 1 ».
Le Vaucler, qui s’orthographie aujourd'hui Vauclair a pour étymologie les deux mots latins : « Vallis clara, le Val illustre ». Les armes qui marquent au front le noble vieillard sont comme un sceau indélébile que la caducité ne saurait lui faire perdre.
II
La Chapelle Saint-Jacques inféodée au Vaucler
Un Aveu de 1554 reconnaît au sire du Vaucler, en outre des droits de bouteillage et « aultres droicts de fondation », celui de visiter et étalonner les mesures « à l’Assemblée qui se tient le dict jour de Saint Jacques », autour de la chapelle.
Le 15 juin 1569. la veuve du sire de la Motte, seigneur du Vaucler, est Catherine de Tournemine qui, en sa qualité de tutrice de ses enfants mineurs, rend aveu à la seigneurie de Penthièvre pour partie de la terre du Vaucler. Elle s’inféode des « droicts d’enfeux, sépultures, chapelles, armoiries, tombeaux, bancs, lisières et aultres droicts dans la chapelle Saint-Jacques ».
Comme en l’église de Saint-Alban, il y eut lutte de prééminences et de droits de fondation entre le comte de Rieux et le comte de la Marck.
Dans ce procès, les témoins déclarèrent que l’écusson « d’argent à trois barres de gueules engreslées » qui étaient les armes pleines du Vaucler avaient autrefois existé au-dessus de la principale vitre du maître-autel de ladite chapelle ; que « le cep et collier » de la seigneurie du Vaucler était placé de temps immémorial près de la porte de la chapelle ; enfin que les « Plaids » généraux de la juridiction du Vaucler se tenaient tous les ans, et sans assignation, près de ladite porte, la veille du jour saint Jacques, patron de ladite chapelle.
Contre ces prétentions, le seigneur de Bienassis n’avait à faire valoir qu’un mandement de l’Official de Saint-Brieuc du 26 août 1484 et un procès-verbal d’août 1526, réservant en sa faveur certains droits de chapellenie et de fondation, à Saint-Jacques, de quelques messes.
En 1785, les choses ont changé, M. Jehannès du Haut-Champ, régisseur de Bienassis, s’occupe à la fois de faire ériger la chapelle Saint-Jacques en succursale, et de faire payer par les vassaux de Pléneuf les « rachapts non acquittés » au comte de Rieux, vendeur. (Lettre au Prieur du Saint-Esprit).
Le projet dressé par M. Minet, à l'occasion de cette vente à messire Visdelou comprenait : 1° un fief de haute justice, en la paroisse de la Bouillie, nommé le baillage de la Hunaudaye ; 2° le baillage de Montafilant (même paroisse) ; 3° le baillage du Vaucler (même paroisse) ; 4° le droit aux foires et marchés du Chemin-Chaussé, c’est-à-dire seulement « du coté de la Bouillie, dans la Rue du Chemin-Chaussé » ; 5° en la paroisse de Saint-Alban, le baillage du Vaucler et de Horiolo, y compris « les droits de fondation de l’église paroissiale de Saint-Alban, tels qu'ils sont reconnus par la transaction passée avec M. le prince d'Aremberg, ainsi que les droits sur la chapelle Saint-Jacques ».
Celte chapelle serait contemporaine de la cathédrale de Saint-Brieuc et remonterait comme elle au XIIIe siècle. C’est ainsi que l’on explique son inachèvement, le grand édifice diocésain que Guillaume Pinchon s’était promis de bâtir ayant absorbé toute autre préoccupation. D’après une légende qui ne vaut pas moins que cette tradition, un seigneur revenant d’Espagne où il avait, à la suite de Du Guesclin, guerroyé contre Pierre-le-Cruel, aurait fondé St-Jacques de Saint-Alban et l’aurait dédié au patron de Compostelle, en exécution d'un vœu.
Le porche, véritable bijou, se compose d’une série d’arcades en ogives, et les gracieux faisceaux de colonnettes qui les supportent, avec corbeilles de fleurs pour chapiteaux, témoignent de l’habileté de l’artiste domptant le dur granit jusqu’à le forcer à s’épanouir.
III
Droits de Foire et de Justice du Vaucler,
à la Chapelle Saint-Jacques
Dés 1436, le Vaucler jouissait d’un droit de foire à la chapelle Saint-Jacques. Le 24 mai de cette année, des lettres-patentes de « Jehan, duc de Bretagne, seigneur de Penthièvre », concédèrent à Guyon de la Motte, seigneur du Vaucler, « droict de foire en la dicte chapelle estant ès fiefs du dict seigneur du Vaucler, pour en jouir luy et ses successeurs, avec coustumes, devoirs, amendes et aultres droicts ».
Aux termes de l’article 33 de la Coutume de Bretagne, les seigneurs, qui n’étaient que moyens et bas justiciers ne connaissaient que des querelles n’entraînant point effusion de sang. Les rixes sanglantes étaient déférées aux justices supérieures.
Plusieurs de ces seigneurs qui avaient droit de foires et de marchés étaient, comme le sire du Vaucler par exemple (à Saint-Jacques) et le baron de la Hunaudaye (à Montbran), hauts justiciers. Quand le droit de foire, comprenant taxe au profit du maître mais avec devoir de police à sa charge, dépendait d’un seigneur n’ayant pas haute juridiction, si les sujets capturés appartenaient à une autre justice ou s’il y avait effusion de sang, on ne pouvait les garder que vingt-quatre heures en prison, sauf à en référer à qui de droit.
Dans le procès de 1746, les témoins déclarèrent, nous l’avons vu, que les Plaids généraux de la juridiction du Vaucler se tenaient tous les ans, et sans assignation, et que de temps immémorial, le cep et collier était placé près de la porte de la chapelle.
Une bête poursuivie par les chiens, et qui a la prétention d’être un loup est sculptée sur le mur extérieur de ce « cep et collier », à côté du porche. Le fauve, pourchassé par la meute, autrement dit le voleur ayant à ses trousses les gens de justice, est une allégorie qui vaut bien la balance-enseigne du Tribunal de paix de Pléneuf, à l’équilibre subordonné au plus ou moins de coup d’œil de l’artiste chargé de dessiner l’emblème.
Cette dépendance de la maison de Rieux est venue aux propriétaires actuels par héritage de leur auteur, M. Minet, l’honorable régisseur du château de lu Hunaudaye.
Analyse des titres produits au procès pendant entre le comte de Rieux et le comte de la Marck.— Rennes, Vatar, 1746.
Analyse des titres produits au procès pendant entre le comte de Rieux et le comte de la Marck.— Rennes, Vatar, 1746.
Analyse des titres produits au procès pendant entre le comte de Rieux et le comte de la Marck.— (Rennes, Vatar, 1746).
Etaient comme eux hauts justiciers, les seigneurs du Guémadeuc (Pléneuf) et de Bienassis (Erquy). — Ruffelet. Annales.